Eau-de-vie obtenue en Normandie par distillation de cidre élaboré avec plus de 200 variétés de pommes et de poires, le Calvados se décline en trois appellations (AOC) selon la nature du terroir (le sol), les fruits utilisés et les différents procédés d’élaboration. C’est avant tout un produit de terroir.
Loin du fast et de la standardisation, il existe encore des produits qui ne sont pas aseptisés, polyphosphatés, concentrés, pasteurisés et aromatisés… Le calvados, cette eau-de-vie obtenue par distillation de cidres de pommes et de poires, en fait partie.
L’Institut National des Appellations Contrôlées (INAO) a délimité trois appellations pour trois régions de production distinctes réparties sur huit départements (Calvados, Manche, Orne, Eure, Seine-Maritime, Mayenne, Sarthe et Oise) : l’AOC Calvados y représente quasiment les trois quarts de la production, l’AOC Calvados « Pays d’Auge » (25%) et le Calvados Domfrontais qui a obtenu son AOC en 1997 avec ses propres pommes et au moins 30% de poires à poiré, pour 1% de la production.
Alors qu’il ne viendrait à l’idée de personne de mettre en cause le rôle essentiel du cépage dans la typicité d’un vin, l’importance des variétés de pommes et de poires dans celui du calvados est également tout à fait essentielle. Les pommes cultivées pour produire le calvados sont bien différentes des “pommes de table”. Ici, point de Pink Lady, Jonagold, et autres Granny Smith, les pommes et poires sont de petite taille, riches en tanins et peu propices à la dégustation au couteau. Près de 200 variétés de pommes ont répertoriées dans ces trois aires d’appellation.
Classées en 4 familles, douce, douce-amère, amère ou acidulée, les variétés de pommes et de poires apportent chacune leur note gustative au cidre, au pommeau et au calvados. Une symphonie de saveurs créée par l’assemblage des variétés et le savoir-faire des producteurs. Ces variétés locales sont le résultat d’un long processus de sélection et de multiplication par greffage. Elles sont adaptées au sol et au climat prévalant dans cette région et portent les noms de Saint Martin, Fréquet, Rambault, …
Des modes de distillation différents
Pour obtenir un bon calvados, il est essentiel de récolter des pommes bien mûres, dans un bon état sanitaire, gage d’obtention d’un très bon cidre. Et les producteurs marient les variétés des 4 familles pour obtenir un produit final harmonieux. Les pommes sont triées, lavées, broyées et la pulpe obtenue est pressée dans des pressoirs pour obtenir un jus qui, totalement fermenté, de façon naturelle, deviendra cidre à distiller.
Le Calvados Pays d’Auge est le résultat d’une double distillation, en alambic charentais, tandis que le Calvados Domfrontais est quant à lui issu d’une distillation en colonne, en une seule passe. Le Calvados AOC, n’a pas de mode de distillation imposé, mais il est produit pour l’essentiel au moyen d’un alambic à colonne. Dans le Calvados, contrairement au cognac, on peut distiller toute l’année mais, pratiquement, cette opération s’échelonne de novembre à avril.
La double distillation des cidres favorise l’extraction des esters aromatiques les plus légers. Elle produit des eaux-de-vie aux notes florales et aux arômes délicats. La distillation unique est plus douce et restitue intégralement les arômes et saveurs de la pomme donnant à l’eau-de-vie le goût intense et puissant de son origine. Elle est également plus rapide.
Les eaux-de-vie ainsi obtenues vont alors subir un vieillissement plus ou moins long, dans des foudres et fûts de bois. Pour porter le nom de Calvados, l’eau de vie doit satisfaire aux exigences imposées par un cahier des charges strict, après un passage sous bois de minimum 2 ou 3 ans. Au départ incolore, l’eau-de-vie acquiert de ces patients échanges avec le bois une robe de plus en plus ambrée.
Les matières tanniques du chêne vont lentement « tisser » la robe et la structure de cette eau-de-vie au départ incolore, et avec le temps, grâce aux échanges entre l’eau-de-vie et l’air, le Calvados va acquérir finesse, rondeur et plénitude. Sa robe va prendre une couleur de plus en plus ambrée.
Le travail du maître de chai ne se limite pas à laisser vieillir le Calvados. Tel un alchimiste, il procède à de savants assemblages en associant des eaux-de-vie d’âges divers, provenant de récoltes ou de terroirs différents afin d’associer les qualités complémentaires de chacune d’entre eux. L’assemblage est une opération délicate qui procède surtout de la dégustation et requiert une grande compétence pour trouver l’équilibre entre bois et fruit. Les maîtres de chai surveillent étroitement chaque eau de vie en dégustant régulièrement chaque fût.
Chaque Calvados défend sa personnalité
Calvados multiples, Calvados uniques, chacun défend sa personnalité, sa complexité, son tempérament… A 2 ou 3 ans d’âge, les calvados sont marqués par des arômes de pommes fraiches, de vanille. Ils conviennent parfaitement pour l’élaboration de cocktails et long drinks, par exemple, allongé d’un Schweppes agrumes ou d’un tonic.
Sur les versions qui ont subi un plus long vieillissement, les notes évoluent vers celles de pommes cuites, de tartes tatins, de pâtes de fruits, de vanille, de notes boisées très fines. Ce qui est frappant lorsqu’on déguste des calvados vénérables, c’est d’y retrouver encore des arômes de pommes alors que dans beaucoup d’autres spiritueux, ce sont les notes boisées qui dominent.
La production de calvados est un Petit Poucet dans le monde des spiritueux : six millions de bouteilles environ sont produites chaque année, et la Belgique est le deuxième pays à l’export. La proximité de la Normandie en fait une destination touristique privilégiée des belges qui connaissent donc bien ses traditions culinaires et sa production de cidre, pommeau et calvados.
📝 Journaliste & responsable de la rédaction
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